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Hep Taxi (20)


HEP TAXI!

Le temps du confinement nous impose une clôture spatiale et nous laisse du temps pour cheminer avec cette fée du logis qui est l'imagination. Mais que diriez vous d'un voyage à l'aventure à travers une histoire. Si vous êtes partants, un taxi vous attend devant chez vous. Bon voyage!

Hep   Taxi -20-

 Philippe sortit de la voiture,  enfila lentement le pardessus, sans pouvoir le boutonner, et avança d'un pas décidé vers l'entrée de France Culture, au 116 du Boulevard Kennedy. 

 Au vigile qui le questionna,  il répondit qu'il voulait voir le directeur en personne et qu'il avait rendez-vous avec lui.

    • Qui dois je annoncer? demanda le vigile,

    • Dites lui simplement qu'il s'agit de Raja...Emile Raja!

 La réponse ne se fit pas attendre et deux hommes en costume sortirent précipitamment de l'ascenseur, pressant le pas dans sa direction.

 Le premier, après l'avoir fixement observé, l'air dubitatif, questionna: «Vous êtes....?» et avant qu'il ne finisse son interrogation, Philippe sortit de sa poche intérieure un document en papier parcheminé sur lequel on pouvait lire: Lauréat du Prix Goncourt 2007, Joseph Azarov alias Emile RAJA, pour son roman «Les bruits de la mer». 

 Désemparés, désolés d'avoir affiché tant de méfiance, les deux journalistes s'excusèrent à plate couture, faisant remarquer tout de même qu'ils n'attendaient pas  une personne ayant cette allure. 

 Ils invitèrent Philippe à les suivre et se dirigèrent vers un studio d'enregistrement. 

Tout en marchant, il leur posa les conditions de l'entretien: pas de photographe, de caméra. L'entretien ne  devait pas être diffusé en direct, au risque de se retrouver nez à nez avec une flopée de journalistes à ses trousses. Et d'admirateurs encombrants. Après une longue traversée de couloir, ils entrèrent dans une pièce entièrement calfeutrée avec une grande table plantée en son milieu.

 Feignant une assurance rare, Philippe balayait du regard, les moindres détails de cette boîte autoclave farcie de micros qui s'inclinaient vers lui. Derrière une vitre qui prenait la longueur de la pièce, un ingénieur du son, aux manettes, faisait des gestes de synchronisation. Une charmante hôtesse disposait des fiches sur la table.

 Conscient du moment solennel qu'il allait vivre, devant les deux journalistes médusés, Philippe se redressa, rassembla tout ce qui était en son pouvoir pour jouer son personnage. Il n'y avait plus de place pour l'imagination, il était devenu l'acteur principal d'un rôle que l'on venait de lui confier.

 Il prit une profonde respiration et pensa fortement au vieil homme, en espérant qu'il serait à la hauteur de la revanche qu'il aurait aimé prendre.

 Après avoir présenté ce qui fera l'objet d'un énorme scoop, mais plus encore, qui devrait rester comme un événement radiophonique, le directeur de Radio France s'excusa de la légèreté de son accueil mais, par un compliment adroit, il avoua qu'il avait été surpris par l'âge de l'écrivain. Il le croyait plus âgé, au regard de son écriture, de la qualité de ses réflexions.

 Philippe se préparait à passer un concours, redoublant de concentration, investi d'une mission, celle d'être à la hauteur de l'événement. Flore l'habitait dans un coin de sa tête. 

 Une lumière orangée se mit à clignoter et une voix sourde annonça:  «Dans trente secondes c'est à vous! Pensez à éteindre vos portables»! 

À SUIVRE....

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JACKY ARLETTAZ