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Le souffle du passé -22- (Feuilleton)


Le souffle du passé                        22


 Pendant que Julien rentrait, en pressant le pas, Julie flânait dans les ruelles du village. Avant de retrouver sa mère, elle s'interrogeait sur cet homme qu'elle quittait toujours avec regret. Pourquoi, lui, si banal physiquement, faisait-il réagir son corps au seul son de sa voix ? D'une bouche ordinaire- elle l'avait bien observée- de ses yeux marron, communs, - elle les avait percés - pourquoi se dégageait-il autant de charme ?

 Se reprenant, et pour l'exclure de ses pensées, elle se persuada que cela ne pouvait   pas ressembler à de l'amour. Non, un homme si vieux, qui a le double de son âge, le visage marqué par la vie, comment pourrait-elle en faire son compagnon ? pensait-elle. Elle décida enfin de rentrer et surtout de ne pas parler de ce trouble au cours du   repas, sous peine de faire défaillir sa maman.

 Pendant ce temps, Julien se réjouissait d'avoir passé un bon moment ; en repensant à Julie, il se dit que cette petite avait vraiment quelque chose de frais, de pétillant, une insouciance intelligente qui lui rappelait sa jeunesse.


 Arrivé au bas de la terrasse, il trouva un panier, dans lequel était soigneusement    enveloppé un loup entouré de glaçons, et deux branches de fenouil, ainsi que deux grappes de muscat. Un petit mot griffonné à la hâte, surmontait le tout : « bonne grillade !»


 La nuit avait déjà fait son œuvre quand Julien finît une dernière rasade de vin blanc de la Clape. Avant de monter se coucher, il rentra dans son téléphone deux rendez- vous qu'il ne devait surtout pas oublier : réserver une place dans le TGV de dimanche en première classe et appeler ce fameux numéro au sujet du projet.

 En fermant les persiennes, il ne put s'empêcher de faire le plein de la symphonie orchestrée par les vagues, et de regarder le ballet des bateaux de pêche, au loin, qui s'agitaient sous la douce lumière bienveillante de la lune.



 Un vent fort, de terre, fit claquer les volets côté chemin. Le bruit sec et soudain, réveilla Julien. Il était déjà huit heures. Il fila boire un café, s'installa sur la terrasse et se décida, promptement, à appeler le numéro qu'on lui avait indiqué. Comme cela j'en serai débarrassé ! imagina-t-il.

 La sonnerie se déclencha rapidement, ce qui surprit un peu Julien qui finissait de boire son café, encore fumant.

Il entendit une voix féminine qui lui répétait : « Allo ? Allo ? Qui est à l'appareil ?

    • Excusez-moi. Je suis le directeur général de la société Sofiscalis, basée à Paris. Et je vous appelle au sujet du dossier du complexe hôtelier que...

    • Ah ! coupa l'interlocutrice, c'est donc vous, ou vos acolytes, qui voulez mettre en œuvre un projet pharaonique qui va dénaturer notre patrimoine ?

    • Oui... mais il n'est nullement question, de renier la nature ; nous nous sommes entourés des meilleurs architectes comme Nichitoya, Deriel, pour vous proposer une architecture qui se fonde dans l'environnement.

    • Monsieur...comment déjà ? Portal, ai-je entendu ? - en plus Portal, murmura-t-elle doucement-, une architecture avec une arrivée massive de plus de mille personnes peut-elle être discrète ?


À SUIVRE...


JACKY ARLETTAZ