Accueil > Blog > Culture, médias > Le souffle du passé -26- (Feuilleton)

Le souffle du passé -26- (Feuilleton)


Le souffle du passé                                   26


 Le choc émotionnel commençait à céder sa place à la raison. Plus à la dignité, même,

 qu'à la raison. Le « titre » de président d'une société prestigieuse, lui semblait maintenant, tellement dérisoire… par rapport à son nouveau statut de père.


 Il fallait vraiment que la rencontre fortuite, originelle, avec Julie, ne devienne pas un obstacle à leur rapprochement officiel ! Que sa fille soit fière de lui ! après que sa mère lui ait expliqué l'histoire de sa venue au monde! Mais quelle histoire allait-elle lui raconter ? Julien pensa que Jeannette aurait un rôle important à jouer pour l'introniser dans ce duo mère-fille, noué de liens serrés et inséparables et surtout pour le faire entrer dans leur vie… Quelle place allait-on lui réserver ? lui, le retardataire à un rendez-vous dont seul le destin connaissait l'heure, et l'endroit ?

 Julien regagna la rive où Julie l'attendait, maintenant, patiemment.

    • « Je voulais vous rejoindre dans l'eau, commença-t-elle, mais j'avais peur que mon chien s'égare. Puis interrogative, elle enchaîna : pourquoi êtes-vous parti précipitamment ? Je vous ennuyais avec mes histoires ? »

 Julien, un brin gêné, essaya de la persuader qu'il crevait de chaud, et qu'il avait un     besoin impérieux de rafraîchissement.

 Julie s'approcha timidement de lui, tout près, et lui annonça, d'une voix triste : « Je vais vous laisser. Je travaille tout à l'heure. Je vous souhaite bon retour et j'espère... à une prochaine fois ».

 Julien s'avança pour lui faire la bise. Julie, tendit la joue puis posa sa tête sur sa poitrine et l'enlaça de ses bras. Elle resta immobile et silencieuse un moment... jusqu'à ce que, en l'éloignant délicatement, il lui fasse remarquer qu'il n'avait pas son numéro de téléphone pour lui envoyer le film de la visite. A ces mots, Julie s’exécuta et retrouva son large sourire en quittant la plage, flanquée de son chien, le visage ensoleillé par la démarche de Julien,

 Arrivée au figuier, elle ne put s'empêcher de se retourner, pour faire un dernier signe   de la main. Pour elle, ce n'était qu'un au revoir...et non plus un adieu.


 Julien réalisa qu'il n'avait pas eu le temps d'amorcer un début d'explication pour faciliter la tâche de Jeannette. Il lui laissait désormais l'écriture du scénario : ce n'était que justice, finalement.

  Ensuite il repensa à ce platane couché en travers du canal, qui avait servi quelque temps de poutre, pour organiser des joutes au-dessus de l'eau : avant d'être emporté, anonyme, lourd de souvenirs. Si la Nature, avait gardé gravée, leur histoire amoureuse, c'est quand même elle, par son évocation, qui avait provoqué leurs retrouvailles. Elle avait gardé la trace du passé pour mieux leur tracer un avenir...

 Puis vint immanquablement à sa mémoire, la soirée de fête qui suivit leur réussite au bac...et la fâcheuse discussion qui la ponctua.

 Jeannette ne souhaitait pas que Julien parte continuer ses études à l'ESSEC Paris, même pour quelque temps, ou seulement à la condition qu'elle le suive, contre l'avis de sa mère ; elle trouverait bien un emploi, en attendant qu'il finisse ses études. Julien, de son côté, avait estimé qu'à dix-huit ans c'était trop tôt pour vivre en couple. Le désaccord au départ, amplifié par les effets de l'alcool avait fini par des éclats de voix qui avaient surpris tous les membres de la bande.  

À SUIVRE...

JACKY ARLETTAZ