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Pour un shopping plus éthique


Vous refusez de cautionner une mode qui se fait aux prix du sang et de la sueur ? Voici le guide du « shopper » conscient.

Nos actes de consommation influencent le modèle de production des biens que nous achetons ici au quotidien. Notre manière de consommer est donc aussi un acte politique : en achetant tel produit à la place d’un autre, mais surtout en exigeant des produits réalisés de manière responsable, on peut promouvoir un modèle de société, et pousser les entreprises à faire évoluer leurs pratiques.

La fourrure est un bon exemple : les mouvements d’appel à ne plus acheter de fourrure animale ont permis de faire évoluer la vente de fourrure, les sociétés ne vont plus en produire.

On le sait, les conditions de travail, les salaires — dans les ateliers des pays du Sud, comme au Bangladesh ou au Cambodge, sont déplorables. Alors, comment faire pour ne pas cautionner ces modèles de production ?

Etape 1 : Acheter moins

Beaucoup d’entre nous ont adopté le modèle d’une mode jetable, la « fast-fashion » promue par les grands distributeurs comme H&M, Zara, Primark etc. Ces chaînes achètent et vendent à prix très bas, et se rattrapent sur les volumes. Elles sont désormais capables de produire 7 à 8 collections par an, et incitent le consommateur à acheter sans relâche leurs produits.

Au final, cette pression se répercute sur les salaires des ouvriers, de plus en plus précarisés et obligés de travailler à des cadences infernales pour satisfaire aux exigences de la mode rapide prônée par ces marques.

La première des choses à faire est de poser la question de ses besoins, résister au marketing de cette « fast-fashion ».Et donc aux pulsions d’achat inutiles et qui nous conduisent à acheter à un prix en fait élevé des vêtements de piètre qualité.

Privilégier des pièces de meilleure qualité, que l’on pourra conserver longtemps, et qui auront donc davantage de valeur !

Etape 2 : Dire adieu aux t-shirts à 3 euros

Comme pour la nourriture, les très petits prix sont en général mauvais signe. Ils s’inscrivent dans un modèle de production (petit prix et dizaines de collections par an ou mauvaise qualité) qui se fait nécessairement au prix de l’exploitation de la main d’oeuvre. Ces entreprises font pression sur les coûts de production, c’est-à-dire le salaire et les conditions de travail des employés des ateliers, pour pouvoir vendre moins cher.

Un tee shirt à 4 euros défie presque les règles économiques ! Il se fait nécessairement au détriment de ceux qui le fabriquent.

Bref, il s’agit d’acheter moins, mais mieux.

Etape 3 : Eviter les grandes chaînes

Mais le prix n’est pas le seul marqueur. Les chaînes moyenne à haute gamme, comme Sandro ou Maje, proposant des prix autrement plus élevés,produisent dans des conditions similaires En général, les très grosses chaînes d’habillement ont une capacité de pression sur les coûts. Le Bangladesh par exemple s’est spécialisé dans ce genre de production en masse parce qu’ils peuvent casser les prix.

D’où l’idée de privilégier des plus petites marques, indépendantes, qui ont plus de chance de produire dans de plus petits ateliers, avec une meilleure visibilité sur leur chaîne d’approvisionnement, et où les conditions de travail sont meilleures.

Etape 4 : Privilégier les circuits alternatifs et les marques responsables

Nous sommes nombreux à vouloir une autre mode, mais aussi se distinguer de la mode mainstream et répétitive ! On peut opter pour la seconde main, les fripes ou encore les vestiaires de consommatrices, les vestiaires partagés ou la location de vêtements. On y trouve désormais des vêtements de bonne qualité, très tendance, originaux, avec le renouvellement rapide des garde-robes.

Ces modèles se développent beaucoup plus en Allemagne, au Royaume-Uni, et offrent une alternative plus attirante qui est en train de se développer aussi en France. Une bonne façon d’agir de manière écolo également, lorsque l’on sait que les capacités même de recyclage des vêtements s’épuisent, en raison de la trop grande consommation de vêtements !

Ensuite, il y a des marques qui intègrent une démarche socialement responsable, écologique, etc : petits créateurs, marques de commerce équitable, up-cycling. Au consommateur de se renseigner auprès d’elles sur leur démarche (matières bio, ou écologiques, ateliers d’insertion, commerce équitable etc.) Certains blogs de mode (Dressing responsable, Hylla penderie partagée, Orelie Pitaval etc. ) donnent des références intéressantes, proposent des bon plans, des adresses.

Etape 5 : Ne pas trop se fier au « Made in » et au « designed in »

Le « designed in France » n’indique rien des conditions de production. Ca veut dire que les vêtements sont conçus ici, mais ils peuvent avoir été fabriqué dans des ateliers partout dans le monde. Il faut donc être vigilant et bien distinguer le « made in » du « designed in ».

Le « made in Europe » n’est pas non plus une garantie de production éthique. En Roumanie, Bulgarie, Macédoine ou Pologne, certaines femmes gagnent des salaires qui ne leur permettent pas de vivre décemment, sans législation pour les protéger suffisamment.

Le « made in France », offre de meilleures garanties ; on peut considérer que droit du travail protège suffisamment les travailleurs en France et surtout qu’il est possible d’engager une action syndicale pour défendre ses droits.

Le « made in » est une appellation plutôt floue, en soi. Elle n’est d’une part pas obligatoire en Europe ; d’autre part, elle peut n’indiquer que la dernière étape de production, ou la plus significative. Or la dernière étape de la fabrication n’est pas nécessairement la plus importante, par ailleurs, l’étiquette ignore tout des autres étapes de la production (confection, teinture etc.) et des conditions dans lesquelles elles ont été réalisées.

Etape 6: Se rendre compte que c’est compliqué en fait…et se politiser

Vous l’avez compris, la seule certitude en la matière est qu’on n’a pas de certitude.

Actuellement, rien ne garantit au consommateur que le vêtement qu’il achète a été produit dans de bonnes conditions. Il y a un manque de transparence sur ce qu’on achète. Les labels bio ou commerce équitable sont une bonne indication, mais concernent la matière première comme le coton. Mais il n’existe pas de label « social » pour indiquer que l’ensemble d’un vêtement est produit convenablement, en raison de la complexité des chaînes de production, et leur éclatement dans plusieurs pays.

Il faut admettre que l’alternative existe, mais elle est encore mince. Les boutiques de petits créateurs se trouvent généralement dans les centres-villes des très grandes villes, donc pas à la portée de tous, et surtout de toutes les bourses.

C’est encore au consommateur de se renseigner sur le caractère éthique ou responsable du produit qu’il veut acheter. Il peut poser la question en magasin par exemple, mais aussi sur les réseaux sociaux.

Notre réel pouvoir, à la disposition de tous et de toutes les classes sociales est moins un pouvoir de consommateur qu’un pouvoir de citoyen ! Il tient dans notre capacité à faire pression et à interpeller les marques. En jouant notre rôle politique. Bref, se considérer comme un citoyen avant d’être un consommateur…

Le Collectif Ethique sur l’étiquette propose des actions : signer des pétitions, interpeller directement les marques, dans les boutiques, sur les réseaux sociaux…Ces actions prouvent leur efficacité, les marques tiennent à leur image. Surtout, c’est en manifestant notre volonté d’avoir accès à des vêtements éthiques que les marques évolueront. A vos claviers !

ARTICLE DE NAYLA AJALTOUNI ET ALICE MARUANI POUR STREETPRESS, LIRE D'AUTRES ARTICLES SUR LEUR SITE